Número total de visualizações de páginas

sábado, 25 de maio de 2013

Les nouveaux défis de la social-démocratie

Le bel avenir du Parti social-démocrate allemand
Ernst Hillebrand (Politologue et directeur du département d'analyse politique internationale de la Fondation Friedriche-Ebert à Berlin)

Malgré sa faiblesse, le Parti social-démocrate allemand (SPD) reste la clé de voûte de tout projet progressiste pour l'Allemagne. L'état général de l'Europe est plutôt favorable à la gauche. Avec la crise financière, l'idéologie néolibérale a perdu de son lustre. La justice sociale, la régulation des marchés et le contrôle démocratique du pouvoir de l'argent sont désormais au centre des préoccupations des citoyens. Et pourtant, le SPD traîne encore dans les sondages.

Cette stagnation est en partie due aux réformes menées par l'ancien chancelier social-démocrate, Gerhard Schröder. Elles ont provoqué l'affaiblissement de l'image de marque du parti comme "protecteur" du petit peuple. Les charges fiscales qui pèsent sur les salaires restent élevées et la richesse des ménages se situe nettement au-dessous du niveau moyen européen. Autrement dit, l'Allemagne est riche, pas les Allemands.

CHANGEMENTS DES STRUCTURES SOCIALES

Des problèmes structurels affectent nos partis en Europe. Les milieux sociaux de l'époque industrielle se diluent. De nouvelles contradictions autour des questions de l'immigration, du multiculturalisme et de l'intégration européenne affaiblissent la cohésion du milieu progressiste : le cosmopolitisme et l'europhilie des élites des partis ne trouvent guère d'écho dans les couches populaires.

Il n'existe toutefois aucune raison d'être pessimiste pour le SPD. Le sentiment dominant de la population est plus social-démocrate qu'auparavant. Les changements des structures sociales et économiques affectent gauche et droite. La féminisation de la société et du monde de travail, l'essor des valeurs postmatérialistes combiné à la libéralisation des mœurs ainsi que le poids montant du vote des citoyens issus de l'immigration posent de sérieux problèmes à la CDU (chrétiens-démocrates, parti conservateur), en recul dans tous les centres urbains.

Le défi à relever pour le SPD consiste à canaliser ces changements au profit du centre gauche. Il faudrait une narration politique qui donne une réponse cohérente aux changements économiques, sociaux, culturels et politiques de notre époque. C'est en économie que la réponse serait paradoxalement la plus facile : l'évolution positive de notre économie depuis le gouvernement Schröder a renforcé la crédibilité du parti.

Avec le concept d'une rénovation écologique de la société industrielle, le SPD a formulé une stratégie de croissance qui contient d'énormes potentialités économiques et écologiques. Il s'agit désormais de recombiner cette crédibilité avec une promesse renouvelée de justice sociale. Ici, la vraie clé ne se trouve pas dans l'augmentation de la redistribution et des transferts sociaux, mais dans le rééquilibrage de la distribution des revenus.

Si la part salariale du revenu national était aujourd'hui au même niveau qu'en 1980, les employés allemands trouveraient 180 milliards d'euros de plus sur leurs bulletins de salaire : une poussée énorme pour le pouvoir d'achat, le marché intérieur et les importations. Finalement, le parti ne pourra pas éviter de moderniser sa conception de la démocratie.

RÉTABLIR LA CONFIANCE

Aussi, en Allemagne, la légitimité de la démocratie représentative est en crise. Les citoyens doutent d'autant plus du degré d'autodétermination que ce système ne leur offre que sa capacité de contrôler et civiliser les forces du capitalisme financier.

Les sociétés hyperconnectées du XXIe siècle ne pourront pas être gouvernées avec les institutions du XIXe. Plus de participation citoyenne, plus de démocratie directe, plus d'informations, de transparence et de responsabilité administrative seront nécessaires pour rétablir la confiance des citoyens dans le système démocratique. Et là aussi, la modernisation a commencé.

Contrairement à ses anciennes positions, le SPD soutient aujourd'hui la création d'un droit constitutionnel au référendum au niveau national. Au niveau du parti, d'importantes initiatives ont été prises pour en renforcer la démocratie interne et pour l'ouvrir aux citoyens. Toutes ces réformes sont faisables. Rien ne demande des changements révolutionnaires, chose rédhibitoire pour le parti dès sa naissance.

Le SPD du XXIe siècle ne sera plus un parti des travailleurs. En réalité, il a cessé de l'être depuis belle lurette. Mais il restera toujours au centre de la société un espace pour un parti qui défend les droits et intérêts des employés et des non-privilégiés, en Allemagne comme dans toute l'Europe.


Le Monde

Sem comentários:

Enviar um comentário