Intervention du chargé d'affaires a.i. de la France
auprès des Nations unies
Madame la Présidente,
Nous commémorons
aujourd'hui le dixième anniversaire de l'attaque contre l'hôtel Canal au cours
de laquelle le représentant spécial du Secrétaire général, Sergio Viera di
Melo, ainsi que 21 autres agents des Nations unies ont trouvé la mort. Je
voudrais rendre hommage à tous ceux qui sont tombés au service des Nations
unies et exprimé notre sympathie à l'égard de leurs familles et de leurs
proches.
Madame la Présidente,
Je remercie le
Secrétaire général ainsi que les différents intervenants pour leurs présentations.
La France souscrit aux interventions qui seront prononcées par le représentant
de l'Union européenne et par la Suisse au nom du Groupe des amis de la
protection des civils.
La protection des
civils requiert une attention constante du Conseil de sécurité, elle doit être
au coeur de son action.
Le Conseil a un rôle
à jouer pour s'assurer du respect du droit international par les parties à un
conflit. Si la responsabilité première en matière de protection des civils
incombe aux États, le Conseil et la communauté internationale ont un rôle
fondamental pour veiller à ce que les États et les groupes armés non étatiques
ne se dérobent pas à leurs obligations. Les civils sont en effet les premières victimes des
violences armées, qui font près d'un demi-million de morts tous les ans.
Le traité sur le
commerce des armes, signé à ce jour par 82 États constitue à cet égard un vrai
progrès. Une fois entré en vigueur, ce traité va permettre de responsabiliser
les États afin que les transferts d'armes ne contribuent plus à ce que soient
commises des atrocités.
C'est plus que jamais
nécessaire car, sur le terrain, nous constatons que les attaques indiscriminées
contre les civils et les attaques délibérées contre les acteurs humanitaires
sont devenues de plus en plus fréquentes. Nous constatons que l'espace
humanitaire n'est pas sanctuarisé. Que les entraves à l'accès humanitaire se
multiplient.
C'est le cas en Syrie
où le régime refuse systématiquement l'accès aux populations civiles dans les
zones qu'il assiège tant que les combats ne sont pas terminés, ceci en
violation flagrante du droit international humanitaire. Je pense aux
populations prises au piège à Qousseir ou dans la vieille ville de Homs. Dans l'ensemble du pays, alors que le nombre de
personnes dans le besoin augmente de jour en jour, pour atteindre aujourd'hui
plus de 6,8 millions, les autorités syriennes refusent toujours l'accès de
l'aide à toutes les populations. Le gouvernement continue d'opposer des
obstacles bureaucratiques à l'action des acteurs humanitaires. Les visas ne
sont pas délivrés, le nombre d'ONG autorisées à opérer est insuffisant, les
exigences gouvernementales pour l'acheminement de l'aide sont de plus de plus
nombreuses, les attaques contre les personnels humanitaires et médicaux sont
une menace constante. Plusieurs personnels notamment du Croissant rouge arabe
syrien ont perdu la vie. Les ambulances, les hôpitaux et leurs personnels sont
devenus des cibles.
C'est le cas également au Soudan, où l'accès aux
populations civiles continue d'être difficile voire impossible pour les acteurs
humanitaires. Là encore les
obstacles se multiplient, malgré les appels lancés par ce Conseil depuis dix
ans, car le blocage de l'aide humanitaire est érigé en stratégie
gouvernementale.
Ces cas de refus arbitraire
d'accès empêchent de sauver des vies et s'ajoutent aux nombreuses violations du
droit international humanitaire. Nous devons mettre fin à cet arbitraire
révoltant. Le Conseil dispose d'instruments pour cela et ne doit pas hésiter à
les utiliser.
Madame la Présidente,
Le Conseil de
sécurité doit être capable de réagir rapidement pour mettre fin à des
situations où les civils sont menacés.
C'est le cas en
République démocratique du Congo, où le Conseil a su accorder à la MONUSCO un
mandat robuste pour soutenir les autorités nationales dans la lutte contre les
nombreuses violations des droits de l'Homme commises à l'Est, notamment les
violences sexuelles. La protection des civils est un aspect fondamental du
mandat de la MONUSCO. Dans le contexte de l'Accord-cadre d'Addis Abeba, la
résolution 2098 vise à fournir au chef de la mission tous les moyens
nécessaires pour assurer la protection des populations civiles menacées par les
groupes armés non étatiques. Elle autorise notamment le déploiement d'une brigade
d'intervention à même de conduire des actions offensives contre ces groupes.
Par ailleurs, la MONUSCO est chargée d'appuyer et de coordonner les efforts en
matière de réforme du secteur de la sécurité (RSS) afin de permettre à la RDC
d'assurer au plus vite la protection de ses populations avec sa propre force de
réaction rapide.
Au Mali,
l'intervention des forces françaises a permis de mettre un coup d'arrêt à
l'offensive des groupes terroristes qui menaçaient Bamako. Le Conseil a ensuite
su prendre ses responsabilités : le déploiement de la MINUSMA, avec un mandat
robuste de protection des civils, a permis la stabilisation du pays et la tenue
d'élections présidentielles dans de bonnes conditions. Nous devons maintenant
poursuivre notre effort pour soutenir la réconciliation nationale au Mali afin
que ce pays retrouve définitivement la paix.
Au Soudan du Sud
également, le mandat de protection des civils de la MINUSS est plus important
que jamais, alors que les violences intercommunautaires ont déjà provoqué le
déplacement de plus de 70.000 personnes depuis janvier. C'est une préoccupation majeure,
particulièrement dans l'État du Jonglei où ces violences ont causé la mort de
centaines de personnes.
Enfin, il nous faut également agir en République
centrafricaine : comme nous l'avons entendu dans cette enceinte il y a quelques
jours, la situation humanitaire et sécuritaire y est dramatique et les
violations des droits de l'Homme généralisées. Les civils sont les
premières victimes. Nous ne pouvons pas laisser la crise s'aggraver plus
longtemps, au risque de voir la RCA se transformer en foyer d'instabilité au
coeur de l'Afrique. Le Conseil doit soutenir les efforts de l'Union Africaine qui s'est
prononcée en juillet pour le déploiement d'une mission de stabilisation
renforcée. Il doit également renforcer le mandat du BINUCA, pour lui donner les
moyens de connaitre des violations des droits de l'Homme commises dans tout le
pays. Des observateurs des droits de l'Homme doivent être
déployés.
Madame la Présidente,
La réaction du
Conseil passe aussi par la lutte contre l'impunité pour les auteurs de
violences contre les civils. Sans justice il ne peut y avoir de paix durable,
de reconstitution du tissu social et de réconciliation entre les communautés. Au Darfour, en Libye, le Conseil a fait ce qu'il
fallait, en saisissant la Cour pénale internationale des exactions commises.
Malgré les obstacles opposés à son action, la Cour reste la garantie d'une
justice efficace et impartiale. Il doit en être de même aujourd'hui en Syrie.
Depuis plus de deux ans, sourd aux appels répétés de
la communauté internationale, Bachar El-Assad assassine son peuple. Plus de
100.000 personnes ont déjà trouvé la mort, en majorité des civils.
Face au sentiment d'impunité qui règne aujourd'hui
dans tout le pays, le Conseil doit envoyer un message clair : les responsables
des crimes de guerres et contre l'humanité seront tenus comptables devant la
justice. La Coalition nationale syrienne s'est prononcée en faveur d'une
saisine de la Cour pénale internationale. Il faut les prendre au mot et
envisager sérieusement une saisine de la justice qui mettrait enfin hors-jeu
les criminels en Syrie.
Je vous remercie./.
L.A.V.
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